Je n’aurais jamais imaginé que ce silence soudain serait le bruit le plus assourdissant de ma vie.
« — Tu as trouvé quelqu’un d’autre, et maintenant ta mère veut même prendre mon appartement ? Ma voix trahissait une douleur que je refusais d’admettre. Cet appartement, cadeau de mes parents, le dernier refuge où je pensais pouvoir encore respirer.
Alexeï haussa les épaules, presque désinvolte : « — Calme-toi, ce n’est pas la fin du monde. Maman a ses raisons. »
Je refusais d’entendre. Quinze ans ensemble, quinze ans de promesses silencieuses, de rires partagés et de rêves murmurés dans cette même pièce. Et tout ça semblait s’effondrer.
Ce soir-là, j’ai choisi de rester plus tard au bureau. Feuillettant des dossiers sans vraiment les lire, j’essayais d’échapper à ce qui m’attendait à la maison. Mais la maison était devenue une énigme muette. Pas de veste sur le porte-manteau, pas de parfum familier dans l’air.
La tablette d’Alexeï, oubliée sur la table, a capté mon attention. J’ai allumé l’écran et mes yeux ont plongé dans un autre monde : des messages tendres, des surnoms affectueux… mais pas pour moi. Marina. Ce nom s’est imprimé dans mon esprit comme un poison lent.
Le cœur battant, je suis restée figée quand la porte a claqué. Alexeï est rentré, comme si rien n’avait changé.
« — Lena ? Pourquoi es-tu là si tôt ? » demanda-t-il d’un ton tranquille, sans un regard en arrière.
« — Qui est Marina ? » Ma voix s’est brisée, mais j’ai tenu bon.
Il a baissé la tête, puis a haussé les épaules en signe de résignation. « — Toi et moi… on vivait dans des mondes parallèles. Tu n’as jamais eu le temps pour moi, pour nous. »
J’ai senti la colère monter, la tristesse, le vide.
Le lendemain, j’ai pris les clés de l’appartement. Cette fois, c’était à moi de décider quel silence je voulais écouter. Les murs, eux, avaient déjà commencé à murmurer une vérité : parfois, perdre quelqu’un signifie enfin se retrouver.